Sonia Sarfati
La Presse
Il y a toujours une première fois. Pour tous et en tout. Et elle est inoubliable. Les humoristes ont donc, une première fois, fait rire. Fait rire d'eux ou fait rire tout court. Ils ont pris goût... au second, s'entend. La Presse a demandé à plusieurs d'entre eux de fouiller dans leur boîte à souvenirs afin d'en ressortir cette première fois. Pour commencer la ronde, celui à cause de qui on pleure depuis quelques jours : Gad Elmaleh, qui a dû annuler ses spectacles après s'être cassé une côte. Et on ne rit pas!
L'humoriste et comédien Gad Elmaleh est né en 1971 à Casablanca, au Maroc. Non, on ne rit pas. Ce n'est ni drôle ni pas drôle. C'est juste un fait. À l'âge de 8 ans, la piqûre de la scène devait déjà le tarauder puisqu'il a trouvé le courage de monter sur une scène avec son père. Qui faisait rire sans les mots, puisqu'il brûlait les planches en tant que mime.
Une première, pour Gad, que ce passage sous les projecteurs afin de jouer les amuseurs publics? Même pas! Il avait déjà tenu le plancher (là, dans le sens de marqueterie ou de linoléum)... chez sa grand-mère. Provoquant les rires de huit personnes à la fois. À 5 ou 6 ans, on appelle ça faire un tabac. Que l'on fume ou pas.
«Ma grand-mère habitait un très vieil immeuble à Casablanca. Il y avait cinq étages, deux locataires par étage», se souvient Gad Elmaleh. Ce sont les faits, encore. Le garçon, artiste dans l'âme, les a déformés, juste assez, pour en faire un spectacle. «J'ai imaginé les neuf voisines, qui venaient les unes après les autres visiter ma grand-mère. Je faisais les portes qui s'ouvraient (NDLR: merci, papa-mime!), les vieilles femmes qui sortaient de chez elle, frappaient chez ma grand-mère. L'une, pour lui emprunter quelque chose. L'autre, pour commérer.»
Elles s'espionnaient, se disputaient, se jaugeaient, se jugeaient. Et, parfois, s'entraidaient et étaient complices. Bref, autant d'activités... normales, dans tel contexte. Mais sous les mots et dans les manières d'un tout petit garçon, ces 10 vieilles Marocaines, c'était l'hilarité assurée. «Et le premier grand fou rire que j'ai provoqué tout seul!» lance celui qui, quelques décennies plus tard, est devenu, sur scène comme au cinéma, Chouchou, le plus populaire des travestis nord-africains.
Y aurait-il les prémices du personnage dans ce tout premier numéro?